Avec mes amis, on aime bien venir se poser sur les marches des berges. L’ouïe me permet à la fois de m’orienter et communiquer, mais aussi de me déplacer. Dans les bars trop bruyants je perds tous mes repères, alors qu’ici je trouve un bon compromis : je peux écouter de la musique, à l’extérieur et avec une grande sensation d’indépendance. En tant que malvoyant, pour sortir d’un bar il faut souvent demander de l’aide, ou se risquer à heurter quelques tables. Sur les berges, je n’ai qu’à me lever et partir ; je suis déjà dehors. Je n’aime pas être entre quatre murs, j’aime sentir les éléments autour de moi. Il y a l’eau, qui me rappelle ma ville d’origine, Conakry en Guinée, elle aussi constituée d’une presqu’ile ; la terre et le vent également, qui me donnent une sensation de liberté. Ces perceptions sont complétées par quelques informations visuelles que je peux discerner grâce à mon œil gauche. Les occasions sont rares cependant, alors j’en profite, comme ici quand la nuit commence à tomber. Les lumières s’allument et se reflètent dans l’eau, ça enrichit mon appréciation du lieu.