Je ne peux plus aller seul à la campagne depuis que j’ai complètement perdu la vue. Aussi je fais régulièrement le parcours du parc des Hauteurs. Je le connais si bien que je pourrais le faire les yeux fermés. J’aime cet ersatz de campagne où je suis en pleine autonomie. J’écoute les gens qui découvrent la vue, qui expliquent ce qu’ils voient. Je me représente ce qu’ils racontent, ça fait travailler mon imagination. Et puis je sens la passerelle osciller au rythme des passants qui empruntent ce chemin suspendu, un peu comme si j’étais sur un bateau ; ça me fait voyager. Je trouve cette passerelle apaisante quand je reviens de la ville. Son coté bucolique me ramène un peu à l’enfance, avec le bruit des oiseaux au-dessus de nos têtes, les cris des enfants dans la cour de récréation en contrebas. Le bruit des cloches de la basilique me ramène chez Balzac ou Flaubert. Je retrouve l’ambiance de leurs romans, où la campagne est souvent très bien décrite. Je marche de façon plus décontractée, en réfléchissant beaucoup, et suis à l’écoute de ce qui m’entoure.